Un raid américain cible un camp de l’État islamique en Libye

Une quarantaine de djihadistes, dont l’organisateur des derniers attentats en Tunisie, auraient été tués près de la ville de Sabratha.

La «métastase» djihadiste en Libye a été la cible d’une frappe chirurgicale menée, dans la nuit de jeudi à vendredi, par l’aviation américaine. Des avions de l’US Air Force ont détruit vers 3 h 30 un camp de djihadistes près de la ville de Sabratha, considérée comme un fief de l’État islamique (EI), dans l’ouest du pays, non loin de la frontière tunisienne. La cible de ce raid, qui a fait 41 morts et une dizaine de blessés selon un bilan non confirmé, était Noureddine Chouchane, un Tunisien soupçonné d’être derrière les attaques contre le Musée du Bardo, à Tunis, en mars, et contre un hôtel de Sousse, sur la côte tunisienne en juillet. Les services de sécurité tunisiens avaient indiqué que ces attaques avaient été orchestrées depuis Sabratha. Chouchane serait mort dans le raid mené par les États-Unis, selon un responsable militaire américain.

L’an dernier, les États-Unis avaient déjà mené une frappe aérienne en Libye pour éliminer un commandant irakien de l’EI, Wissam Najm Abd Zaïd al-Zoubaïdi, alias Abou Nabil. Mais ce nouveau raid pourrait préfigurer une autre phase de la lutte internationale contre Daech, jusqu’à présent centrée sur le Levant, l’EI n’ayant cessé de se renforcer ces derniers mois en profitant du chaos libyen. Centrés sur Syrte et sa zone côtière, les territoires «tenus» par Daech s’élargissent en direction des sites pétroliers, objectifs très convoités, à l’est et au sud.

L’EI compterait actuellement quelque 5000 combattants en Libye, dont 3000 étrangers. Parmi ces derniers, figurent des djihadistes ayant reflué d’Irak et de Syrie où ils sont mis sous pression par la coalition occidentale. Mais de plus en plus de combattants «néophytes» arrivent désormais directement en Libye, «sans passer par la case Levant», relève avec inquiétude une source informée.

«Nous sommes engagés pleinement et totalement, c’est un combat essentiel de l’humanité contre la barbarie.»

Manuel Valls

Les principales puissances susceptibles d’intervenir contre Daech en Libye (Grande-Bretagne, France, Italie…) conditionnent d’éventuelles opérations à l’installation d’un pouvoir légitime à Tripoli, qui les appellerait à l’aide. Après des semaines de confusion, un gouvernement d’union nationale a finalement été annoncé mais son approbation reste très incertaine, le Parlement internationalement reconnu ayant reporté son vote à mardi prochain.

D’ores et déjà, des plans s’esquissent, les vols de reconnaissance se poursuivent et des forces spéciales occidentales ont été aperçues sur le terrain. Toutefois, «la perspective n’est pas d’envoyer des gens au sol mais d’aider les Libyens à se sécuriser», affirme une source à la Défense.

Les répercussions du raid américain inquiètent fortement au Sahel, plus au sud, où l’on redoute de voir se replier les djihadistes opérant en Syrie. Le premier ministre Manuel Valls était vendredi au Mali et sera samedi au Burkina Faso pour réaffirmer le soutien de la France à ces deux pays sous tension sécuritaire après les attentats contre des hôtels à Bamako (20 morts le 20 novembre) et à Ouagadougou (30 morts le 15 janvier). «Nous sommes engagés pleinement et totalement, c’est un combat essentiel de l’humanité contre la barbarie», a affirmé M. Valls qui s’est rendu vendredi à Gao, centre de commandement du fuseau ouest de l’opération militaire française «Barkhane» (3500 hommes intervenant avec cinq pays de la zone). Cent cinquante opérations ont été menées en 2015. Mais ce dispositif est confronté à une mutation du djihadisme, les groupes armés structurés cédant le pas aux kamikazes déterminés à se sacrifier en faisant un maximum de victimes dans les capitales sahéliennes.

Source : Le Figaro